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Une société du groupe
09/08/2020
Dans une décision en date du 9 juin 2020, le Conseil d’État a apporté des précisions quant à la compétence d’une personne publique pour lancer et mener une consultation alors même qu’elle n’a pas encore la compétence pour signer le contrat y afférent.
Jusqu’au 31 décembre 2019, une commune bénéficiait de la concession de plusieurs plages naturelles situées sur son territoire. Dès le début de l’année 2018, la métropole dont elle est membre a décidé de faire jouer le droit de priorité dont elle bénéficie en vertu de l’article L. 2124-4 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP) afin de se voir attribuer la future concession des plages susmentionnées, pour la période du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2031. Dans cette perspective, la métropole a lancé, en octobre 2018, une procédure de passation d’une délégation de service public (DSP) balnéaire divisée en 14 lots d’exploitation de plage. Trois candidats évincés de trois lots différents ont, chacun de leur côté, saisi le juge du référé précontractuel afin de faire annuler la procédure de passation des 3 lots concernés.
Par trois ordonnances, le juge des référés a fait droit à ces demandes. Il s’est fondé sur le fait que « cette procédure, y compris le choix de l’entreprise attributaire, avait été conduite par la métropole […], alors que le contrat par lequel l’État était susceptible de lui attribuer la concession des plages naturelles de [la ville], dont l’attributaire était jusque-là la ville […], n’était pas encore signé et que l’enquête publique préalable n’était pas terminée ».
Il en a déduit que « la métropole n’était pas compétente pour conclure le contrat quand elle a lancé la procédure de passation ni pendant qu’elle la conduite et qu’il en résultait nécessairement que la commission de délégation de service public de la métropole n’avait pu procéder régulièrement à l’analyse des offres, qui aurait dû être effectuée par la commission de la ville […], et que la procédure de passation avait nécessairement été conduite par une autorité qui n’était pas habilitée à cette fin ». La métropole a alors formé un pourvoi en cassation.
Après avoir rappelé les termes de l’article L 551-1 du code de justice administrative (CJA) relatif au référé précontractuel, le Conseil d’État précise qu’il incombe au juge, lorsqu’il est saisi d’un tel recours, « d’apprécier si ont été commis des manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles d’avoir lésé ou ont risqué de léser, fût-ce de façon indirecte, l’entreprise qui le saisit ». Mais, « il ne lui appartient pas de contrôler si, au regard de l’objet du contrat dont la passation est engagée, la personne publique est, à la date où elle signe le contrat, compétente à cette fin ».
Le Conseil d’État précise également que « le juge du référé précontractuel ne saurait davantage déduire de la seule circonstance que la procédure de passation du contrat est engagée et conduite par une personne publique qui n’est pas encore compétente pour le signer que cette procédure est irrégulière, au motif notamment, s’agissant d’une délégation de service public, que la commission de délégation de service public qui a procédé à l’appréciation des offres serait nécessairement, dans une telle hypothèse, irrégulièrement composée et que la procédure de passation serait nécessairement conduite par une autorité qui n’est pas habilitée à cette fin ».
En effet, « lorsqu’une personne publique a vocation à exercer la compétence nécessaire à la conclusion et à l’exécution d’un contrat de la commande publique, notamment parce qu’elle est en cours de création ou de transformation ou parce qu’une procédure, par laquelle la compétence nécessaire doit lui être dévolue, est déjà engagée, aucune règle ni aucun principe ne font obstacle à ce qu’elle engage elle-même la procédure de passation du contrat, alors même qu’elle n’est pas encore compétente à cette date pour le conclure ». Tel est le cas, notamment, « lorsque le contrat en cause a pour objet la gestion d’un service public ». Il appartient seulement à la personne publique « de faire savoir, dès le lancement de la procédure de passation, que le contrat ne sera signé qu’après qu’elle sera devenue compétente à cette fin ».
Enfin, rappelons qu’une « personne publique peut par ailleurs signer un contrat dont la procédure de passation a été engagée et conduite par une autre personne publique, à laquelle, à la date de la signature du contrat, elle est substituée de plein droit, sans que cette procédure soit, en l’absence de vice propre, entachée d’irrégularité ».
Ainsi, en statuant comme il l’a fait, le juge des référés a commis une erreur de droit. D’autant qu’aucun vice n’a été relevé et que la métropole avait expressément fait savoir que le contrat ne serait signé qu’après l’attribution de cette concession.
Les ordonnances du juge des référés sont annulées.
Citia
Conseil en achat public